A.5. De Damas à Tarse

Séjour en « Arabie »

Après son baptême, Saul « passa quelques jours avec les disciples, à Damas, et aussitôt il se mit à prêcher Jésus dans les synagogues, proclamant qu’il est le Fils de Dieu. » (Ac 9,19-20)

Lorsque Paul donne lui-même son témoignage, il écrit aux chrétiens de Galatie qu’il est parti aussitôt pour « l’Arabie », puis qu’il est revenu à Damas.

Il écrit ensuite : « Après trois ans, je montai à Jérusalem » (Gal 1,18). Ces trois années correspondent sans doute à ce séjour « en Arabie », voyage aller-retour compris, et à un nouveau séjour à Damas, avant d’en partir pour Jérusalem.

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La « route des rois », en rouge.

On estime généralement que cette « Arabie » était le Royaume Nabatéen, dont la capitale était Pétra, et le roi Arétas IV. Flavius Josèphe, historien juif du 1e siècle utilise en effet ce mot « Arabie » pour désigner Pétra.

Saul a dû emprunter la « route des rois », qui traverse toute l’actuelle Jordanie, du nord au sud. Cette route était un axe commercial très important à l’époque, emprunté par les caravanes.

De Damas à Pétra, il faut compter environ 450 km, et donc 900 km aller-retour.

Nous n’avons aucune idée de ce que Saul a pu faire, ou vivre, dans cette région. Un temps de retraite personnelle ? Une annonce du Christ, comme à Damas ?

 

Sur les pas de Saul en « Arabie »

Pétra, trésor de l’humanité
L’ancienne capitale du Royaume Nabatéen fait partie des trésors de l’humanité.

 

 

 

 

 

 

 

 

La fuite de Damas

Après son séjour en « Arabie », voici Saul de retour à Damas.

St Luc, sans mentionner de voyage en « Arabie », parle « d’un certain nombre de jours », après lesquels Saul doit fuir de Damas. Cette expression vague peut très bien inclure ces trois années, et même l’aller-retour à Pétra ou sa région.

Les raisons du départ de Saul pour Jérusalem, dans des circonstances rocambolesques, diffèrent selon les sources.

1e version, donnée par Luc : 

Au bout d’un certain temps, les Juifs se concertèrent pour le faire périr. Mais Saul eut vent de leur complot. On gardait même les portes de la ville jour et nuit, afin de le faire périr.  (Ac 9, 23-24)

2e version donnée par Paul : 

À Damas, l’ethnarque du roi Arétas faisait garder la ville des Damascéniens pour m’appréhender. (2 Co 11,32)

Il est possible que ces deux versions ne soient pas en contradiction, et que les Juifs de Damas se soient entendus avec l’autorité politique pour mettre la main sur Saul. Le livre des Actes des Apôtres le montre explicitement en d’autres endroits (Ac 13,50).

Icône moderne de la fuite de Paul à Damas

En tout cas, les deux versions se rejoignent sur le mode de fuite de Saul : on le descend, de nuit, dans un panier, le long des remparts. 

 

 

On fait mémoire de cet événement, à Damas, à la porte Bab Kisan, dans la chapelle St Paul, ci-dessous.

 

Saul, introduit par Barnabé auprès de Képhas et Jacques

Partant clandestinement de Damas, Saul retourne à Jérusalem, à pied, par la route empruntée trois ans plus tôt. Au sud-est de l’Hermon, sur le plateau du Golan, le long du lac de Tibériade, dans la vallée du Jourdain, jusqu’à Jéricho, puis la montée à Jérusalem : 280 km.

Arrivé à Jérusalem, Saul cherche à entrer en contact avec les disciples de Jésus, mais n’y arrive pas car sa réputation de persécuteur est restée, et les chrétiens ont peur.

Alors Barnabé le prit avec lui, l’amena aux apôtres et leur raconta comment, sur le chemin, Saul avait vu le Seigneur, qui lui avait parlé, et avec quelle assurance il avait prêché à Damas au nom de Jésus. (Ac 9,27)

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Pierre et Paul – El Greco

Comment Barnabé connaissait-il Paul ? On ne le sait pas. Comment avait-il suffisamment confiance en lui pour l’amener aux Apôtres eux-mêmes ? Dans ce passage des Actes, Barnabé semble bien connaitre l’épisode de la conversion de Saul, 3 ans plus tôt. On a même l’impression qu’il a été témoin de la prédication de Saul à Damas. Pourrait-on imaginer que Barnabé, un des piliers de l’Église de Jérusalem, se soit trouvé à Damas lorsque Saul y était ? C’est possible.

Dans l’épître aux Galates, Paul précisera qu’il est resté 15 jours avec Képhas (St Pierre) et qu’il a rencontré aussi Jacques.

C’est la première rencontre avec Pierre. Il y en aura d’autres. Nous retrouverons Pierre et Paul, bien des années plus tard, à Rome. La dévotion populaire aura uni leurs martyres respectifs.

Retour à Tarse

Dès lors, Saul circule librement parmi les disciples, et annonce le Christ.

Il s’adressait aussi aux Hellénistes et discutait avec eux ; mais ceux-ci machinaient sa perte. L’ayant su, les frères le ramenèrent à Césarée, d’où ils le firent partir pour Tarse.  (Ac 9,29-30)

Cette mention est confirmée par Paul, dans l’épître aux Galates, écrivant qu’après avoir rencontré Képhas et Jacques, il est parti pour la Cilicie (Ga 1,21), dont Tarse fait partie.

Notons que St Étienne était helléniste, c’est à dire qu’il parlait grec, et que ce sont des Juifs hellénistes qui ont provoqué son arrestation et sa mort. Saul, qui est lui aussi juif helléniste, était d’accord avec ce meurtre. Ce sont les mêmes qu’il doit fuir maintenant en partant pour sa ville natale, via Césarée maritime. Lors de son dernier passage à Jérusalem, plus de 20 ans plus tard, ce seront encore des Juifs hellénistes (originaires d’Asie mineure) qui provoqueront l’arrestation de Paul (Ac 21,27).

Le voyage se fait en prenant d’abord la route principale reliant Jérusalem à la côte, puis en longeant la côte vers le nord jusqu’à Césarée maritime. Là, Saul embarque sur un voilier et rejoint Tarse. Cela représente 127 km de route, et environ 490 km par mer.

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Une kybèle antique reconstituée

Les Nabatéens

Les Nabatéens sont un peuple commerçant de l’antiquité, ancêtres des Arabes, vivant au sud de la Jordanie et de Canaan, et au nord de l’Arabie actuelle. Avec la chute de l’Empire séleucide, ils étendent leur territoire vers le nord, jusqu’à la région de Damas. Les auteurs gréco-latins appellent leur royaume du nom d’Arabie, alors que Flavius Josèphe utilise aussi le nom de Nabatène. Leur territoire est frontalier de la Syrie, de la péninsule arabique, de l’Euphrate et du nord de la mer Rouge. À partir de l’intervention de Pompée (64 av. J.-C.), le royaume nabatéen devient un royaume client de Rome, mais il conserve une large autonomie. Sa capitale était la cité troglodytique de Pétra, située aujourd’hui en territoire jordanien.

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(Source : Wikipédia)

Un « état – client » est un état ou royaume vassal d’un empire tout en conservant son autonomie.

Arétas

Arétas IV étant monté sur le trône du royaume nabatéen en 9 av. JC, sans avoir sollicité l’accord de Rome, contrairement aux usages pour les États-clients, Auguste décide d’annexer temporairement son royaume de 3 à 1 av. J.-C.

Hérode Antipas avait épousé Phasaelis, la fille d’Arétas IV lors de la succession d’Hérode le Grand. Mais vers 35, celle-ci s’enfuit pour rejoindre son père à Pétra, avant qu’Antipas ne la répudie pour épouser Hérodiade. Cela provoque une guerre entre Arétas et Hérode vers 36 sur les territoires disputés de l’ancienne tétrarchie de Philippe et notamment Gamala, guerre que remporte Arétas IV selon Flavius Josèphe. Arétas meurt en 40 ap. JC.

Pièce de bronze d’Arétas. Inscription : Arétas roi de Nabatée, année …

Pièce de bronze d’Arétas. Inscription : Arétas roi de Nabatée, année …

(Source : Wikipédia)

Saint Barnabé
Saint Barnabé - Icône

Saint Barnabé – Icône

Né dans l’île de Chypre, Barnabé ne faisait pas partie du groupe des douze apôtres. Cependant les Actes des Apôtres lui en attribuent le titre au sens large, comme à Paul.

Barnabé était le cousin de Marc l’évangéliste. Dans un esprit de partage il vendit un champ, dont il mit le montant de la vente à la disposition des apôtres (Ac 4,36-37). Alors que son nom était Joseph, il avait été surnommé Barnabé par les apôtres, ce qui signifie « fils d’encouragement » (Ac 4,36).

Barnabé accompagnait Paul de Tarse dans ses premières missions chez les païens. Il est mentionné dans les Actes des Apôtres au chapitre 15 au sujet du concile de Jérusalem.

Lors du second voyage apostolique de Paul, ce dernier et Barnabé connurent un désaccord au sujet de la composition de leur équipe. Barnabé voulait emmener Marc mais Paul n’était pas de cet avis. Ils se séparèrent donc et formèrent deux équipes. Paul et Silas partirent pour la Lycaonie, tandis que Barnabé et Marc s’en allèrent évangéliser Chypre (Ac 15,36-40).

Là s’arrêtent les données fondées sur des documents fiables remontant au premier siècle. La suite repose sur des traditions beaucoup plus tardives et moins sûres. Barnabé se serait retiré dans l’île de Chypre où il serait mort martyrisé près de Salamine, l’actuelle Famagouste. Son tombeau, découvert sous l’empereur Zénon (Ve siècle), contenait un exemplaire de l’Évangile selon Matthieu. Il serait mort en l’an 75 après J.-C.

(Source : Wikipédia)

Saint Jacques « le mineur »
Saint Jacques le mineur Georges de la Tour

Saint Jacques le mineur
Georges de la Tour

Saint Jacques « le Mineur » (en opposition à St Jacques fils de Zébédée, frère de St Jean) est identifié au « frère du Seigneur » : « N’est-ce pas le charpentier, le fils de Marie, le frère de Jacques, de Joset, de Jude et de Simon ? Et ses sœurs ne sont-elles pas ici parmi nous ? » (Mc 6,3).

La tradition en fait le premier évêque de Jérusalem, d’après la place importante que les Actes des Apôtres lui réservent dans la communauté chrétienne de cette ville (voir par exemple Ac 15, où Jacques parle en dernier).

St Paul l’appellera « colonne de l’Église » (Ga 2,9), comme Pierre et Jean.